INTERVIEW
Je constate que nos discussions, ainsi que celles de nos organisations membres, avec le Gouvernement ont permis au dossier d’évoluer plus favorablement et que de nombreuses conditions posées par l’UNAPL ont été réunies

Michel Picon

Président de l’UNAPL 

Le 9 janvier dernier, l’UNAPL a déposé une motion dans laquelle elle appelait le Gouvernement à concrétiser quatre revendications pour poursuivre sereinement le dialogue. Quelles sont-elles ? 

En premier lieu je tiens à rappeler que l’UNAPL et les professions libérales n’étaient pas demandeuses d’une réforme de leur système de retraites. Toutefois pour éviter que tout se décide sans nous, nous avons accepté de nous asseoir à la table des négociations. Mais nous avons posé de nombreuses exigences et conditions au Gouvernement. 

Nous avons constamment demandé qu’avec un niveau de cotisations sociales constant, nous devions retrouver un montant de retraite a minima identique à celui que nous connaissons avec nos régimes actuels. Aujourd’hui, notre fermeté a payé puisque pour un grand nombre de professionnels libéraux, ce sera le cas.

Je constate que nos discussions, ainsi que celles de nos organisations membres, avec le Gouvernement ont permis au dossier d’évoluer plus favorablement et que de nombreuses conditions posées par l’UNAPL ont été réunies. 

Par exemple, les caisses de retraite complémentaire professionnelles pourront instaurer un dispositif de retraite supplémentaire aux professions qui le souhaitent. Le taux d’abattement sur une nouvelle assiette des cotisations sociales est fixé dans la loi à 30 %, le sort des réserves est également garanti dans la loi au seul bénéfice des professions qui les ont constituées et, enfin, la représentation spécifique des professions libérales est là encore actée dans la loi.

Les professionnels libéraux seront représentés au Conseil d’Administration du régime universel et nous avons aussi obtenu la mise en place d’un conseil de Protection sociale des professions libérales. Mais ce n’est pas tout, car  l’UNAPL, appuyée par l’U2P, par leur travail assidu de négociation auprès du Gouvernement, a aussi obtenu d’autres avancées :

• Un taux de cotisation réduit à 12,94 % pour les 2e et 3e Pass, ce qui – faut-il le rappeler – n’était nullement prévu dans le projet initial ;

• Le maintien du dispositif ASV-PCV pour les professionnels de santé dans le cadre d’un financement conventionnel à la hauteur des 2/3 ;

• Une période de transition longue et adaptable pour lisser dans le temps les effets des variations des cotisations et pensions ;

NOS CAISSES NE SERONT PLUS AUTONOMES. JE REGRETTE QUE LE GOUVERNEMENT SE SOIT MONTRÉ INFLEXIBLE SUR L’AUTONOMIE ENTIÈRE DES CAISSES DES PROFESSIONS LIBÉRALES

Les professionnels libéraux en cumul emploi-retraite pourront acquérir des droits supplémentaires avec leurs cotisations, et ainsi améliorer leur retraite à compter du 1er janvier 2022.

Quel regard l’UNAPL porte-t-elle actuellement sur la réforme des retraites ?

Comme je l’ai dit les professionnels libéraux nous n’avions pas besoin de cette réforme, complexe et difficilement lisible. Certes, le Gouvernement nous a écouté, le Président de la République qui vient de nous recevoir aussi. Mais au fond, la détermination de l’Exécutif à réformer les 42 régimes de retraites spéciaux ou autonomes reste intacte quels que soient nos arguments. C’est un véritable combat que l’UNAPL, et avec elle l’U2P, mènent pour préserver à l’intérieur de ce régime universel les spécificités de nos professions. La bataille des chiffres et des simulations n’est pas terminée. La phase de transition reste à définir précisément. Et puis, la conférence de financement n’est pas terminée, nous y sommes associés, et le moins que l’on puisse dire est qu’il sera, là aussi, difficile de construire un consensus entre les partenaires sociaux.

Concrètement, si la réforme est appliquée en l’état, quels seront les impacts sur les professions libérales et qu’adviendra-t-il de leurs caisses ? 

Nos caisses ne seront plus autonomes. Je regrette que le Gouvernement se soit montré inflexible sur l’autonomie entière des caisses des professions libérales. Celles-ci vont être placées sous l’autorité de la Caisse nationale du régime universel via une convention de gestion, et elles n’auront concrètement plus la liberté de définir le niveau des cotisations et des pensions pour les professions. À présent, et après l’adoption du projet de loi en première lecture à l’Assemblée nationale dans le cadre du 49-3, l’UNAPL reste plus mobilisée et vigilante que jamais. Nous suivrons avec attention les prochaines discussions et débats au Sénat, puis le retour du texte à l’Assemblée nationale. Enfin, l’UNAPL se prépare déjà à intervenir et suivre de très près la rédaction des futures ordonnances qui permettront d’articuler la mise en œuvre de la future réforme. Il ne s’agit pas que tout ce que nous avons obtenu comme améliorations soit détruit aux détours d’amendements inconsidérés ou d’ordonnances sournoises.