INTERVIEW
Le CRAPS s’est fixé comme objectif de servir la Protection sociale dans toutes ses composantes chaque fois qu’il le faut, ou que ce soit, et de réfléchir à son avenir

Alain Gilles

Vice-Président du CRAPS en charge des relations internationales

Un secteur international a été créé lors de l’Assemblée Générale 2016 du CRAPS ; en tant que Vice-Président vous en avez la responsabilité, quelles sont les objectifs à long terme ?

Le CRAPS s’est fixé comme objectif de servir la Protection sociale dans toutes ses composantes chaque fois qu’il le faut, ou que ce soit, et de réfléchir à son avenir. Véritable force de proposition, reconnu pour ses diners-débats et surtout ses publications et fort de son rayonnement, il décidait en 2016 de sortir du cadre national. Il recherchait en effet, tout en mettant à profit l’expertise de ses adhérents et de ses partenaires, l’opportunité d’enrichir la réflexion, d’échanger et de mutualiser certaines problématiques, mais aussi d’être l’ambassadeur du système de Protection sociale français à l’étranger et encore d’apporter son soutien à ceux qui pourraient en avoir besoin.

C’est ainsi que depuis 2016 notre think tank s’est engagé dans différents types d’échanges et de réflexions en liaison ou non avec ses partenaires : 

• Les Etats-Unis sur la chirurgie ambulatoire à Boston et Nashville.

• L’ONU, au Bureau International du travail de Genève, sur l’emploi et le chômage.

• Le Japon sur le système hospitalier nippon et la robotique.

Dans le même temps, pendant que le BIT ambitionnait de réduire la pauvreté dans le monde en élaborant son programme phare mondial de socles de Protection sociale, le CRAPS ambitionnait, à son niveau, d’apporter sa contribution à la généralisation de la couverture maladie. Tout au moins, il s’agit de contribuer à la mise en place de garanties élémentaires minimales de sécurité sociale. Il fait sienne l’idée selon laquelle la Protection sociale est un droit humain dont sont exclus aujourd’hui 3,8 milliards de personnes. Faisons en sorte qu’elle devienne à terme une réalité pour tous !

Quel rôle la France peut-elle avoir pour accompagner la création ou l’amélioration de systèmes de Protection sociale au sein des pays en développement ?

On ne peut imaginer que la France ne joue un rôle dans le développement des systèmes de Protection sociale des pays du sud. Elle dispose d’une couverture à laquelle les Français sont attachés du fait en particulier que ce système repose sur des valeurs d’égalité, de solidarité et de cohésion sociale.

Elle ne peut en effet rester insensible à la situation mondiale inacceptable ou un habitant sur deux n’a pas accès à la couverture santé et plus encore à la situation des pays en développement, du moins de ceux d’Afrique Francophone pour lesquels la Protection sociale en matière de soins de santé ne couvre pas 10% de la population.

Sa politique vis-à-vis de l’Afrique francophone s’explique par des préoccupations historiques, culturelles, géopolitiques et humanitaires avec certains intérêts économiques. La France participe à la sécurité de ces pays avec les accords de défense, son engagement militaire sous mandats internationaux… Elle est un des principaux investisseurs et l’un des plus importants partenaires commerciaux du continent africain. Elle est aussi, bien entendu, le leader naturel de la francophonie qui peut être utilisée comme levier de promotion de la démocratie. Alors comment pourrait-elle ne pas jouer un rôle d’autant que la paix sociale de ces pays passera par la Protection sociale et l’emploi notamment des jeunes (40% ont moins de 20 ans dans certains pays) ?

La France est déjà engagée aux côtés de l’OIT dans son programme phare mondial des socles de Protection sociale !

Elle l’est aussi fortement au niveau européen avec Socieux+, l’Expertise de l’UE pour la Protection sociale, le travail et l’emploi !

Elle l’est plus encore avec Expertise France, l’agence française de coopération technique internationale, dans le domaine « santé et développement humain » !

Il convient d’aller plus loin afin, non pas d’apporter le modèle français, mais bien plus d’aider à la réflexion des différents acteurs de la Protection sociale en sachant intégrer les particularismes d’un contexte culturel, économique, géographique… en sachant par ailleurs soutenir financièrement et surtout techniquement les actions locales voire régionales, de la CIPRES par exemple.

Quelles sont les actions et les partenariats envisagés par le CRAPS ?

Précisément, le CRAPS peut soutenir l’action des acteurs de la Protection sociale de ces pays tout en confortant son statut de laboratoire d’idées par l’enrichissement et l’élargissement de sa réflexion dans certains domaines.

Certes, il n’est pas dans ses intentions de se substituer à l’institutionnel ou à certains organismes français ayant déjà des partenariats bilatéraux (caisses, hôpitaux…).

Il n’est pas non plus dans ses intentions de proposer des solutions toutes faites mais davantage d’apporter sa pierre à l’édifice en suscitant les bonnes questions, en sensibilisant tous les acteurs à cet enjeu de la Protection sociale et de son avenir, aux problématiques de la gouvernance, du financement… et en les convainquant de la nécessité de les mettre tous autour d’une table. Qui d’autre qu’un club de réflexion, qu’un think tank de la Protection sociale peut mieux le faire ?

Voilà bientôt un an qu’il a commencé à s’engager auprès d’organismes de Protection sociale  d’Afrique francophone qui cherchent à conforter voire à améliorer leur propre système dans les domaines de la santé, de la prévoyance, de l’emploi, de la retraite et bien entendu du dialogue social.

Des partenariats ont déjà été tissés et commencent à vivre :

Avec la Caisse Mutuelle Interprofessionnelle Marocaine (CMIM). Ce partenariat donne lieu à des échanges réguliers de part et d’autre, à la participation du CRAPS aux journées de la Santé au Travail, à la participation de la CMIM à certains de nos dîners-débats, à la réflexion par ailleurs quant à la création d’un Club de Réflexion de l’Avenir de la Santé au Travail (CRAST) voire à celle d’un think tank de la Protection sociale.

Avec l’Institut National de l’Assurance Maladie (INAM), couverture santé des fonctionnaires au Togo. Nos réflexions et nos échanges visent entre autres à soutenir l’INAM dans la perspective d’élargissement de l’Assurance maladie au Togo puis à aider les différents acteurs à la création et l’animation d’un think-tank à l’instar du CRAPS.

D’autres partenariats suivront !

Pour terminer, j’aimerais ajouter que notre action internationale nous impose rapprochements, dialogues, partenariats peut être avec les organismes d’expertise français (Expertise France), européens (Socieux+), mais aussi des nations unies. C’est ainsi d’ailleurs que le CRAPS participait à la 2ème journée du programme phare mondial des socles de la Protection sociale organisée par le Bureau International du Travail (BIT) de Genève.