Face aux attaques terroristes, à une délinquance et à des manifestations de plus en plus violentes, les membres de la communauté Sécurité-Défense intègrent le risque de blessures, d’invalidité ou de mort, qui fait dorénavant partie intégrante de leur quotidien, ce qui les fragilise sur le plan psychologique.

Didier Malinowski

Vice-Président de la MGP

La police, telle que nous la connaissons, est fille des Lumières. Pour la première fois de notre histoire, la Constituante de 1789 proclamait que la garantie des droits de l’Homme et du Citoyen nécessite une force publique, et que cette force est instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée.

Cette approche humaniste et universaliste crée un lien particulier entre la Nation et les forces de sécurité qui la protègent. L’on peut considérer qu’elle institue pour la République le devoir moral de protéger celles et ceux qui la protègent, et notamment de leur offrir une Protection sociale. Et pourtant, les policiers ont dû organiser cette Protection sociale de leur propre initiative, créant au début du XXe  siècle une multitude de sociétés de secours mutualiste locales ou régionales, qui ont progressivement fusionné pour donner naissance à la Mutuelle générale de la police (MGP).

L’État, au nom de la «  concurrence libre et non faussée  », a, depuis 2006, progressivement supprimé les aides et facilités qu’il accordait depuis l’après-guerre aux mutuelles des forces de sécurité, supprimant les subventions directes, la mise à disposition de locaux, remettant en cause la mise à disposition de fonctionnaires, qui constituent le cœur même de la gouvernance de ces mutuelles, et qui leur sont dorénavant facturées après avoir failli disparaître. Cette conception libérale d’inspiration anglo-saxonne fait fi des spécificités du modèle mutualiste français et de son caractère non lucratif, de sa forme solidaire et de sa gouvernance démocratique. Elle trouvera sa consécration en 2012, avec l’entrée en fiscalité des mutuelles de Livre II, alignée sur le régime des sociétés d’assurance.

De surcroît, cet état-employeur qui n’accorde à ce jour aucune aide à la mutualisation de ses agents au ministère de l’Intérieur, vient récemment d’autoriser l’accès de ses locaux à tous les acteurs mutualistes et assurantiels du marché, accroissant la concurrence déjà rude qui frappe les mutuelles historiques affinitaires.

Ces coups de boutoir répétés se conjuguent ces dernières années à une inflation réglementaire d’origine communautaire, dont la traduction la plus symptomatique est la mise en application de la directive « Solvabilité 2 » qui contraint les mutuelles à adopter un modèle prudentiel taillé pour les acteurs capitalistiques du Marché, tandis que s’accentuent leurs charges financières, consécutives au désengagement progressif de l’état en matière de prise en charge des dépenses de santé.

Parallèlement à ces dispositions réglementaires qui mettent à mal leurs complémentaires santé, les fonctionnaires d’autorité qu’elles protègent ont vu augmenter de manière exponentielle les risques auxquels ils sont exposés, dans une société de plus en plus violente où leur activité professionnelle est source de danger croissant sur le plan physique, comme sur le plan psychologique, juridique ou médiatique.

Face aux attaques terroristes, à une délinquance et à des manifestations de plus en plus violentes, les membres de la communauté Sécurité-Défense intègrent le risque de blessures, d’invalidité ou de mort, qui fait dorénavant partie intégrante de leur quotidien, ce qui les fragilise sur le plan psychologique. Cette fragilité psychologique est accentuée par une insécurité juridique liée à leurs interventions et à leur mise en cause quasi systématique par des groupes de pression politisés, qui les diffament sur les réseaux sociaux et dans les médias, nuisant gravement à leur vie familiale. Ces violences physiques et psychiques vis-à-vis des forces de l’ordre conduisent un nombre d’entre eux toujours croissant à commettre l’irréparable en mettant fin à leurs jours.

Face à cette détresse des forces de sécurité, leurs mutuelles se doivent de se réinventer, en sortant du strict cadre de leurs prestations santé et complément de traitement.

La MGP s’y emploie, en créant par exemple un service de soutien psychologique en ligne gratuit, assuré par des psychologues cliniciens, ou bien une allocation opérations de police versée à ses adhérents hospitalisés suite à une intervention de police, ou encore en créant une prestation déménagement d’urgence apportant une aide aux membres des forces de sécurité contraints de changer de domicile suite à des menaces pour leur intégrité physique ou celle de leur famille. Elle fut également précurseur dans la création de journées de prévention santé (prévention des troubles musculo-squelettiques, nutrition, dépistage du diabète et de l’hypertension…) qu’elle finance et organise sur des sites policiers et préfectoraux, en rapport étroit avec le ministère de l’Intérieur.

Une action sociale de haut niveau et la prise en charge des problématiques des membres de force de sécurité dans leur globalité, seront probablement les éléments différenciants qui permettront de renforcer la Protection sociale de la communauté Sécurité-Défense.