Tribune

Portrait de Michel Picon, Président de l'UNAPL
« Les défis de ces 100 prochains jours sont très nombreux et la tâche qui attend le gouvernement […] est ardue »

Michel Picon
Président de l’UNAPL et Trésorier du conseil d’administration de l’UNEDIC

La Première ministre Élisabeth Borne a détaillé la feuille de route du Gouvernement à l’occasion d’une allocution prononcée le 27 avril dernier. Celle-ci doit guider le calendrier politique des 100 prochains jours, dont le bilan devrait être tiré au 14 juillet. L’UNAPL est très attentive à la mise en place des mesures qui accompagneront ce temps politique. Les quatre piliers sur lesquels s’appuieront ces 100 jours concernent en effet de près les professions libérales.

Sur les questions de travail et de plein emploi tout d’abord. Les entreprises libérales représentent plus d’une entreprise sur trois et sont un vivier important d’emploi, avec près d’1,2 million de salariés. La question de l’inflation est donc une préoccupation majeure pour l’UNAPL. Les dernières données dévoilées par l’observatoire Xerfi/U2P pour le 1er trimestre 2023 confirment que l’année sera synonyme de difficultés pour les entreprises libérales. À l’unanimité, les trois familles de professions libérales, santé, droit et techniques et cadre de vie, constatent une baisse de trésorerie et anticipent un repli d’activité dans les mois à venir. L’UNAPL veillera à ce que la situation des professions libérales soit prise en compte en cas de dégradation de leur activité.

Pour contrer la hausse des prix et améliorer le pouvoir d’achat, le gouvernement prévoit de renforcer l’obligation de partage de la valeur dans les entreprises de 11 à 50 salariés. Une loi doit être présentée prochainement pour traduire l’accord national interprofessionnel signé par les partenaires sociaux sur le sujet. Les TPE libérales ne sont, pas concernées par ces obligations pour leur grande majorité, car elles emploient moins de 11 salariés. Je tiens toutefois à rappeler notre attachement à la mise en place de dispositif de partage de la valeur dans les TPE libérales. Nous avions pris des initiatives dans ce sens, pour permettre aux entreprises libérales d’accéder aux dispositifs d’épargne salariale.

Le recours à l’épargne salariale, l’intéressement ou encore la participation devrait être encouragé et généralisé dans la future loi sans imposer de contraintes supplémentaires aux TPE, ce qui est une bonne chose. Le partage de la valeur est un important vecteur d’attractivité pour nos entreprises et l’UNAPL encourage les employeurs libéraux à y recourir. Personnellement, cela me tient à cœur.

L’UNAPL, en tant qu’organisation patronale, est également partie prenante, à travers l’U2P, dans la transformation de Pôle emploi, qui sera remplacé par France Travail en 2024. Je participe, en tant que membre de l’UNEDIC, à la mise en place de France Travail. L’emploi dans les entreprises libérales est un chantier prioritaire pour l’UNAPL. Nous militons également pour favoriser l’embauche des jeunes dans les entreprises libérales, via l’alternance et l’apprentissage.

Et, pour terminer sur le chapitre de l’emploi, l’UNAPL portera les intérêts des professionnels libéraux et leurs entreprises dans le cadre du « nouveau pacte de la vie au travail » voulu par le Gouvernement d’ici à l’été.

Au-delà du volet travail des 100 jours, l’UNAPL est également vigilante aux mesures qui seront prises sur les sujets de la transition énergétique et la réindustrialisation. Nous avons lancé un groupe de travail Environnement, au sein de notre organisation, pour travailler sur ces questions centrales de climat et de transition énergétique dans les professions libérales. Les métiers de la famille de la santé, notamment, sont des métiers du vivant et l’UNAPL souscrit de longue date au concept « One Health ». La santé doit être appréhendée globalement dans sa dimension à la fois humaine, animale, environnementale.

Enfin, la feuille de route du gouvernement jusqu’au 14 juillet aborde deux piliers essentiels pour les professions libérales : la santé et la justice. Ces deux domaines d’activité font face à des difficultés sans précédent et se doivent d’être réformés rapidement, pour améliorer le quotidien des professionnels et de nos concitoyens. D’une part, la garantie de l’accès à des soins de qualité pour tous les Français et sur l’ensemble du territoire est un défi majeur. L’UNAPL, qui rassemble les principaux syndicats représentatifs des professions de santé, partage avec eux la nécessité de faire confiance aux acteurs libéraux pour réformer le système de santé. Ce qui passe par un système conventionnel renforcé avec l’Assurance maladie et une revalorisation décente des actes des professionnels de santé.

La loi prévue dès le mois de juin pour simplifier, moderniser et réduire les délais de notre justice suscitera également toute l’attention de l’UNAPL pour accompagner les métiers du Droit dans ces transformations. L’UNAPL n’abrite pas moins de 11 organisations de professionnels libéraux du secteur du Droit.

Les défis de ces 100 prochains jours sont très nombreux et la tâche qui attend le gouvernement dans les domaines de l’emploi, de la santé, de l’environnement ou encore de la justice est ardue.

Toutefois, je suis convaincu que la « cicatrisation » des fractures laissées sur le pays par la réforme des retraites, ne sera possible et durable que si une place plus importante est donnée au dialogue social et aux corps intermédiaires. A cet égard, l’initiative prise par le CESE de réunir les partenaires sociaux pour débattre du travail, est à saluer. Ce type d’initiative doit se multiplier pour éclairer les débats législatifs et les décisions du Gouvernement.

L’UNAPL, qui représente 67 organisations représentatives des professions libérales, sera un interlocuteur attentif du bilan qui sera fait au 14 juillet. Le pays, qui fait face à des crises multiples : économique, démocratique, sociétale attend des réponses d’ampleur pour être réformé. Mais attention, pour que ça fonctionne, le Président de la République et le Gouvernement devront redonner toute sa place au dialogue social.