INTERVIEW
Pour mémoire, je rappelle que ces critères sont réglementaires : Service Attendu/Service Rendu et Amélioration du Service Attendu/ Amélioration du Service Rendu

Isabelle Adenot 

Présidente de la CNEDIMTS (HAS)

Pourriez-vous repréciser en quelques mots le rôle de la CNEDIMTS ?

La Commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDiMTS) est la Commission de la HAS qui évalue les produits de santé entrant dans le champ de la LPP. Les produits qu’elle évalue sont principalement des DM, mais aussi d’autres produits de santé tels que les aliments diététiques destinés à des fins médicales spéciales (ADDFMS) et des produits d’assistance pour compenser une situation de handicap, ainsi que les prestations associées à ces produits de santé.

Sa mission d’évaluation scientifique intervient une fois le marquage CE obtenu.

Son rôle est de donner aux ministres un avis consultatif recommandant ou non la prise en charge des DM, de contribuer à la détermination des conditions de bon usage et de la place dans la stratégie thérapeutique, diagnostique ou de prévention. 

En exprimant un avis en réponse aux demandes des industriels en vue d’un accès de leurs dispositifs au remboursement, la CNEDiMTS a un double devoir: reconnaitre et mesurer avec clairvoyance l’innovation utile, incrémentale ou de rupture, médicale ou de qualité de vie, pour les français malades ou en situation de handicap. D’autant que les dispositifs médicaux évoluent à la vitesse des technologies et prennent une part croissante dans l’arsenal thérapeutique, les parcours de soins et de vie.

Considérez-vous que le grand appareillage orthopédique externe sur mesure mériterait, avec d’autres dispositifs à faible prévalence et sur mesure, une évaluation spécifique et si oui laquelle ?

Les critères d’évaluation de la CNEDiMTS sont les mêmes quel que soit le type de technologie. Pour mémoire, je rappelle que ces critères  sont réglementaires : Service Attendu/Service Rendu et Amélioration du Service Attendu/ Amélioration du Service Rendu.

Toutefois, la CNEDiMTS prend en compte le fait que dans le domaine de l’appareillage, l’évaluation de besoin individuel est essentielle pour déterminer le produit qui répondra le mieux aux besoins de la personne en situation de handicap, à ses habitudes de vie, à son projet de vie et à son environnement. 

Néanmoins, il est à noter que dans le nouveau règlement européen « ne sont pas considérés comme des dispositifs sur mesure les dispositifs fabriqués en série qui nécessitent une adaptation pour répondre aux exigences particulières de tout utilisateur professionnel, ni les dispositifs qui sont produits en série par des procédés de fabrication industriels suivant les prescriptions écrites de toute personne habilitée ».

Dès lors, la commission attend des données cliniques de bonne qualité démontrant l’intérêt de la technologie considérée pour un groupe populationnel donné. 

Pour répondre plus spécifiquement à la question des exigences pour les produits visant une population à faible prévalence, la réalisation d’études :

• multicentriques internationales

• le plus tôt possible et avant diffusion large de la technologie,

permet d’augmenter le nombre de sujets susceptibles d’être inclus. Une étude contrôlée randomisée conçue et réalisée en double aveugle (ou du moins avec un observateur indépendant) est l’étude offrant le meilleur niveau de preuve. Toutefois, dans certaines situations, ce type d’étude peut ne pas être possible pour évaluer les DM et la Commission prend en compte ce contexte et adapte ses exigences, sous une réserve : la CNEDiMTS attend de l’industriel qu’il explique et argumente cette impossibilité.

Par exemple, dans le cas d’une prothèse externe destinée à remplacer l’articulation de hanche chez des patients amputés au niveau de la désarticulation de la hanche, la Commission a trouvé un intérêt à un dispositif dans les indications revendiquées malgré les limites majeures des études soutenant la demande de l’industriel. La Commission a, dans cette situation pris en compte le fait : i) que cette technologie visait une population extrêmement restreinte (moins de 60 personnes par an) ; ii) qu’elle élargissait l’arsenal disponible ; iii) et que ses caractéristiques fonctionnelles devraient permettre une marche plus proche de la marche physiologique et ainsi limiter les répercussions sur le rachis et le risque de chute.

Qu’attendez-vous de ces échanges dans le cadre des 1ères Assises Nationales de l’Appareillage Orthopédique ?

Beaucoup…

En effet, il est toujours très intéressant et constructif d’entendre les différents acteurs sur leurs attentes et les pistes d’améliorations qu’ils proposent. 

Par ailleurs, ces Assises seront aussi très probablement l’occasion de parler de la révision des nomenclatures génériques en vigueur qui sont pour une part obsolètes. La CNEDiMTS a proposé des nomenclatures actualisées ou re-bâties totalement compte tenu de l’obsolescence de celles en vigueur par rapport aux produits sur le marché.  C’est notamment le cas pour la nomenclature relative aux prothèses de membres supérieurs. La réévaluation de l’appareillage du membre inférieur devant ensuite suivre la même logique.

Enfin, ce sera pour moi l’occasion :

• de présenter la façon dont la HAS de façon générale, et la CNEDiMTS dans ce cas particulier, prend en compte le point de vue des patients ou personnes en situation de handicap dans ses évaluations d’accès ou de maintien au remboursement des DM. En effet, ils disposent d’un savoir spécifique sur leur maladie, le vécu de leur maladie, les traitements existants, les parcours de soins, les besoins. 

• d’insister sur l’évaluation du critère de qualité de vie : la qualité de vie peut en effet être un critère de jugement très pertinent pour certaines technologies, notamment celles qui impliquent une adhésion du patient pour l’utilisation du produit. Ce type de critère doit être pris en compte aussi souvent que possible dans les études soutenant les demandes, toujours avec une méthodologie rigoureuse.