Si les garanties de la couverture santé proposée par les divers acteurs semblent satisfaisantes, le volet « prévoyance » pourrait être renforcé pour mieux couvrir les risques croissants auxquels sont confrontés les gendarmes.

Armando de Oliveira

Général de division & Directeur des personnels militaires de la gendarmerie

La Protection sociale revêt une importance singulière pour les membres de la communauté Sécurité-Défense, qui doivent être protégés des risques spécifiques inhérents à leurs fonctions, et être bien accompagnés quand ils ont à en souffrir.

C’est d’autant plus vrai pour le gendarme, soldat de la loi, au confluent de la défense et de la sécurité intérieures, qui partage au gré de ses missions les dangers auxquels sont confrontés le militaire et le policier. Majoritairement militaire de carrière, il vit en caserne, dans un logement concédé par nécessité absolue de service qui conditionne la disponibilité et la proximité de la gendarmerie pour assurer la sécurité de la moitié de la population française, sur 95 % du territoire. Il est confronté quotidiennement à un risque professionnel qui s’est accru du fait d’une menace terroriste persistante et de radicalités violentes rencontrées de plus en plus fréquemment, avec pour effet un surcroît de mobilisation pour la protection de nos concitoyens. Entre 2018 et 2019, 20 gendarmes sont décédés dans l’exercice de leurs fonctions, 15 683 ont été blessés en service, dont 4 617 du fait d’une agression physique.

La Protection sociale est donc naturellement au cœur des préoccupations de la gendarmerie. Notre institution a une longue tradition de solidarité et d’action sociale depuis la création en 1888 par le capitaine Paoli de la première caisse de secours mutuel militaire, parfaite illustration des valeurs qui forgent l’identité du gendarme et qui sont la force de notre institution, fondamentalement humaine.

Dans ce contexte de forte sollicitation, notre devoir est d’apporter une protection globale aux gendarmes pour qu’ils puissent continuer à s’engager, en confiance. Cette attention doit se manifester en particulier par un travail de prévention et par un soutien adapté des personnels fragilisés et de leurs familles, qu’ils soient blessés, touchés par la maladie ou en souffrance psychologique. Un accompagnement social ciblé, par exemple en matière de logement pour ceux qui ne sont pas logés par nécessité absolue de service, ou encore de mobilité des conjoints et de garde d’enfant, leur est aussi nécessaire pour les aider à articuler harmonieusement leurs vies professionnelle et personnelle. C’est une juste reconnaissance à l’égard de ceux qui ont choisi cette difficile et noble mission de protection de nos concitoyens.

Aujourd’hui, cependant, en matière de santé-prévoyance, le nouveau dispositif a pour conséquence une perte de lisibilité des offres proposées et, de ce fait, une diminution du taux de couverture chez les plus jeunes (près de 10 % d’entre eux ne disposent pas de couverture complémentaire). Cette situation préoccupante doit encourager à une clarification des offres et à une sensibilisation des jeunes sur les enjeux de la Protection sociale, pour eux-mêmes et leur famille. Cela nécessitera un effort de communication des opérateurs.

Certains besoins restent par ailleurs à combler. Si les garanties de la couverture santé proposée par les divers acteurs semblent satisfaisantes, le volet « prévoyance » pourrait être renforcé pour mieux couvrir les risques croissants auxquels sont confrontés les gendarmes, par exemple en révisant les capitaux garantis et en incluant dans le socle référencé l’invalidité pour maladie ou encore l’assistance-rapatriement en cas de décès à l’étranger ou outre-mer.

En outre, les réservistes, désormais régulièrement mobilisés, méritent de voir poursuivis les efforts entrepris pour adapter la couverture dont ils bénéficient, en simplifiant les modalités de prise en charge et en accélérant leur indemnisation pour ne pas les fragiliser en cas d’accident entraînant une interruption de travail dans leur emploi habituel.

La Protection sociale est consubstantielle à l’identité militaire et contribue au maintien en condition opérationnelle des forces. Pour la communauté Sécurité-Défense, elle doit être envisagée comme un véritable levier RH de recrutement et de fidélisation, et évoluer en conséquence. La crise sanitaire a fortement mobilisé tous les acteurs de la Protection sociale. Son importance a été mise en lumière. Il faut en tirer profit.

L’enjeu est important car les attentes de nos personnels sont fortes en la matière.